« Souvent, j’ai accompli de délicieux voyages, embarqué sur un mot dans les abîmes du passé, comme l’insecte qui flotte au gré d’un fleuve sur quelque brin d’herbe ».

BALZAC.

Cette citation me fut envoyée par Anne, l’artis-Anne .

Pour moi, cette exposition dans la ville de Bordeaux des sculptures, maquettes, lithographies… de JAUME PLENSA, s’apparente à un voyage estival qui, s’il peut paraître immobile à ceux qui sont épris de paysages lointains, fut l’occasion d’un voyage intérieur. Le but de l’artiste est donc atteint puisqu’il écrivait dans la revue de présentation :

Mes sculptures sollicitent physiquement le spectateur. Ce n’est pas un travail de voyeurisme, il faut pouvoir la partager, marcher autour, passer au travers, la pénétrer. C’est une nécessité. La sculpture est en fait un prétexte pour provoquer un mouvement, intérieur, certes, mais aussi physique.”

JAUME PLENSA

Mais l’artiste était-il conscient que la sollicitation des spectateurs irait jusqu’au vandalisme ? J’ai appris ce matin-même, que la sculpture qui suit ,AINSA II ,a été vandalisée par trois individus, malgré ses 450 kg et qu’elle s’est écrasée au sol. SELF PORTRAIT et AINSA I ont été également vandalisées.

**

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Fils de pub et fils d’inox, homme de paille et homme de lettres avec un petit air de chevalier en armure venu jusqu’à nous, à coup de lettres et de signes sur le Cours de l’Intendance :voici

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Ainsa II, 2013, en acier inoxydable et pierre, 320 x 225 x 350 cm

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Ainsa est le nom d’un petit village médiéval, perché  près de Huesca dans les Pyrénées aragonaises.

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Un joli petit village avec ses remparts, son clocher, ses ruelles aux maisons de pierre,( son figuier couvert de fruits), sa place et la fraîcheur sous ses arcades.

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L’artiste sélectionne les blocs de pierres dans une carrière de pierre de Huesca servant de socle à ses personnages de transparence. Les photos d’Ainsa ont été prises en 1997 avec un appareil argentique.

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« La pensée ne peut tenir dans l’homme.

C’est pourquoi elle se lance comme un bélier contre le ciel,

Fichée comme un coin entre couleur et couleur,

Cherchant son lieu

Dans le corps du monde.

*

Sa charge de puissance nue

Ravage les bords et le fond,

Comme un courant barbare

Qui dévore son lit.

La pensée est une liberté plus grande que l’homme. »

 ROBERTO JUARROZ (V,36)

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Pour terminer ce parcours, voici quelques œuvres de dentelle,plus éclectiques sous forme de maquettes dans le salon de l’Hôtel de Ville

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ou bien quelques lithographies de la Galerie ARRÊT SUR L’IMAGE mettant au premier plan la musique ; juste pour faire le pendant des « mélomanes » du Jardin Public.

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Place donc à Berlioz, Verdi, ou encore Bartok.

Place à la musique parce qu’elle est aussi et avant tout écriture et langage.

Un dernier petit tour et s’en iront les  sculptures disséminées dans la ville…

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FIN…

 Maïté L

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«L’architecture de nos corps est le palais de nos rêves».

 JAUME PLENSA

***

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SELF-PORTRAIT: place Camille Jullian

2013, acier inoxydable, 350 x 325 x 325 cm

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L’Homme-Monde agenouillé dans sa sphère, individu parti à la découverte de l’universalité du langage,la diversité des cultures. L’individu inscrit dans un tout, une forêt de signes, dont il ne peut se dissocier .

***

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***

Arrive un jour

où la main perçoit les limites de la page

et sent que les ombres des lettres qu’elle écrit

S’échappent du papier.

*

Derrière ces ombres,

elle se met alors à écrire sur les corps dispersés par le

  monde,

sur un bras tendu, sur un verre vide,

sur les restes de quelque chose.

*

Mais vient un autre jour

où la main sent que chaque corps

furtivement et précocement dévore

l’obscur aliment des signes.

*

Le moment est venu pour elle

d’écrire dans l’air,

de se conformer presque à son geste.

Mais l’air aussi est insatiable

et ses limites obliquement étroites.

*

La main décide alors son dernier changement

et se met humblement

à écrire sur elle-même.(V,2)

ROBERTO JUARROZ

***

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*******

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***

THOUGHTS : Place Fernand Lafargue

2013, acier inoxydable et pierre, 310 x 200 x 270 cm

***

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« Thoughts est constituée de phrases, de pensées qui s’entrecroisent et se chevauchent sur de grands bandeaux en acier inoxydable.

Elle illustre parfaitement cette recherche de la construction de la pensée dans l’espace, les croisements de langues et de langages plastiques et littéraires chers à l’artiste » /Dossier spécial Bordeaux Délices

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***

Depuis 1992, l’artiste a été honoré par les titres de Chevalier des Arts et des Lettres du Ministère de la culture en France (1993), et celui de Docteur Honoris Causa de la School of the Art lnstitute of Chicago (2005).

Il expose régulièrement ses oeuvres d’art à la Galerie Lelong à Paris, Galerie Lelong à NewYork et Richard Gray Gallery à Chicago et à New York.

***

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***

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***

“Il [le sculpteur] a regagné sa liberté publique, il n’a plus besoin de décorer ni de commémorer, il peut à nouveau parler de sculpture. C’est-à-dire poser de petites questions, inscrire sur le mur très discrètement un petit point d’interrogation : je crois que c’est la véritable fonction de la sculpture d’aujourd’hui.”

JAUME PLENSA

 ***

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******* à suivre  pour un ultime billet…

« Voici venir la nuit.

 

Aux enclumes du soir

frappent les rayons de lune.

 

Voici venir la nuit.

FEDERICO GARCIA LORCA/ Eau dormante, Air final.

***

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***

Voici venir la nuit bleue

 

« Bleue est la couleur du regard, du dedans de l’âme et de la pensée, de l’attente, de la rêverie et du sommeil »

JEAN-MICHEL MAULPOIX

***

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 ***

Ce soir-là les réverbères tâtonnaient tandis que les nuages dans un grand tourbillon de nuit bleue, couleurs non modifiées, donnaient de la voix, donnaient ce rien de velouté qui nous enveloppait sur les pavés.

« Au bout du jour, la nuit me dresse à voir plus clair »aurait dit CLAUDE SERNET à moins que ce ne fut l’impassible penseur qui eût pu le dire.

***

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***

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***

Jaume Plensa aurait-il eu en tête ce soir-là le poème Élévation

de CHARLES BAUDELAIRE :

Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,
Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,
Par-delà le soleil, par-delà les éthers,
Par-delà les confins des sphères étoilées,

 

 

Mon esprit, tu te meus avec agilité,
Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l’onde,
Tu sillonnes gaiement l’immensité profonde
Avec une indicible et mâle volupté.

 

 

Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides ;
Va te purifier dans l’air supérieur,
Et bois, comme une pure et divine liqueur,
Le feu clair qui remplit les espaces limpides.

 

 

Derrière les ennuis et les vastes chagrins
Qui chargent de leur poids l’existence brumeuse,
Heureux celui qui peut d’une aile vigoureuse
S’élancer vers les champs lumineux et sereins ;

 

 

Celui dont les pensers, comme des alouettes,
Vers les cieux le matin prennent un libre essor,
– Qui plane sur la vie, et comprend sans effort
Le langage des fleurs et des choses muettes !

***

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***

***à suivre, mais avec d’autres sculptures: les dernières?***

 

Avec la complicité involontaire des passants que je remercie.

La porte ouverte à leurs regards, leur admiration, leurs caresses, leur escalade.

***

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Le penseur croqueur de façade du XVIII ème siècle

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***

« Il y a une porte ouverte

Et pourtant il faut la forcer.

 

Nous ne savons ce qu’il y a derrière,

Mais de là vient l’appel.

 

Nous pouvons aller ailleurs,

Mais nous venons d’ailleurs.

 

Nous sommes dehors et le savons,

Mais peut-être que tout est dehors.

 

Toujours nous cherchons cette porte

Mais elle devrait être fermée.

 

Ici l’ouvert est infranchissable.

Comment franchir ce qui n’existe pas ?

 

Il faut fermer l’unique porte

Afin peut-être de pouvoir entrer. (VI, 104) »

ROBERTO  JUARROZ

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Dialogue avec les Trois Grâces

***

« Le jeu du dedans

Se fait parfois complice

Du jeu du dehors

Et tel ou tel des deux

Utilise les marionnettes de l’autre,

Les masques, le hasard et les pièges de l’autre.

Ainsi les deux jeux se fondent

En un jeu cynique

Où peut aller jusqu’à disparaître le joueur.

 

Serait-ce que pourrait aller jusqu’à disparaître du jeu

Le jeu lui-même (VI,100) »

ROBERTO JUARROZ

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dans les bras du penseur

***

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*** à suivre***

à  JEA, trop tôt disparu

**

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J’aurais tant aimé qu’il continue à goûter les sculptures de Jaume Plensa, mais surtout à vivre intensément pour tous les combats de grand humaniste qu’il menait, pour la vie auprès des siens…

Il avait apposé cette citation sur un des volets du sujet  et je lui avais promis de la reprendre très prochainement. Voici le temps venu :

RENÉ CHAR :

« La poche d’un poète comme un carré de ciel, une pincée de terre, contient ce qu’un poète ne sait pas : les mousses et les brumes de sa propre vie. Et des gouttes de soleil et de sang »…

**

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HOUSE OF KNOWLEDGE :

  • « 2008, acier inoxydable, 800 x 550 x 530 cm
    Place de la Bourse
    Composée d’une multitude de lettres soudées, cette grande forme humaine est comme une invitation permanente au voyage dans l’espace et dans la sculpture elle-même. Encourageant la contemplation silencieuse ainsi que l’exploration physique et sensorielle en invitant le public à entrer et à marcher à l’intérieur, le vide monumental se transforme ici en réceptacle de nos émotions et de nos rêves. »
  • **
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Sapere? Cognoscere?

Méli de pensées, Mélo du monde, depuis l’intérieur de la tête du penseur.

**

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Toi tu me hantes

Quand tu m’ouvres ta porte

symbolique

Sur la nuit, sur le jour, sur le ciel.

De lettre en lettre, tu files le néant

Le déclines  en clair, en obscur.

**

Toi, l’immobile quêteur de temps

Qui passe,

Le tourbillon autour de toi

Te laisse, ausculté par des curieux

 Aux caresses de doigts voyageurs.

**

Toi qui cueilles le vent en entre-deux,

La vie en quelque sorte

Du dehors au-dedans

 Toi, qui fais grotte qui fais clan

Tu me hantes.

***

Toi la créature de l’artiste

La maison ouverte aux passants

**

Toi tout  l’été pelotonné

Sur les rives de l’ailleurs.

**

Toi que l’on escalade

Dans le vertige du sa-voir

Tête en mouvement

House ok knowledge

Frôlant la folie

 des étoiles

Qui une à une s’allument

Comme  les réverbères.

**

 « Les rois ne touchent pas aux portes » écrit Francis Ponge

« Ils ne connaissent pas ce bonheur ».

 J’ai frôlé ton invisible absence

Tes invisibles frontières.

Regard  parti à l’assaut

dans la cheminée de ton cerveau.

**

Transparence

sur ta peau de dentelle

Sorti de la prison :

A livre ouvert ! tu es LIBRE !

**

Une porte ouverte sur le rien

Mais le rien devient un tout,

Un creux où la pierre essaime

**

Le ciel essaime

La ville essaime.

Au pays de l’homme monde qui laisse entrer et sortir le monde.

**

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**

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**à suivre** sur le même sujet…

«   En tant que sculpteur je travaille essentiellement dans le domaine des idées et non pas avec la matière ou les formes, même si chaque idée exige bien évidemment une matière et une forme mais là n’est pas ma préoccupation principale. »

JAUME PLENSA

*

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Esplanade Edmond Géraud 
The Poets, 2012 (Body Soul, Country,Water fire), résine et acier inoxydable, 800 x 152 x 31 cm

Nous sommes loin des bronzes  de  RODIN, de son «  Penseur «

http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Penseur

ou de sa sculpture « Méditation avec bras »

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***

 « Les Poètes apparaissent comme une suite poétique de » La Llarga Nit », en référence au poème du poète catalan Vicent Andrés Estellés. »

http://www.mallorcaweb.com/magteatre/estelles/1956-71.html

Colo pourra peut-être nous en dire plus sur le poète catalan et le contenu du poème « la Llarga Nit ».

Son blog :

http://espacesinstants.blogspot.fr/

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« (The Poets) Ils se présentent comme des figures de lumière assis sur des mâts, les yeux fermés et isolés dans une position accroupie méditative. Chacun effectue un geste distinct avec ses mains : Body Soul cache ses oreilles, Country, ses yeux, et Water Fire, sa bouche. Ils sont la métaphore de l’énergie interne de la pensée humaine. » (Présentation de l’exposition dans la revue Bordeaux Délices)

 Le symbole des trois singes revisité:

« Les trois petits singes ont été introduits par un moine Bouddhiste de la secte Tendai vers le 7ème siècle. A l’origine, ils étaient associés à la divinité Vadjra.
Mizaru (l’aveugle), Kukazaru (le sourd) et Iwazaru (le muet) exprime le message de sagesse suivant :
Je ne vois pas le mal

Je n’entends pas le mal

Je ne dis pas le mal »

ce que je traduirais volontiers par:

* je cherche à voir ce qui est positif

* J’entends d’une oreille sélective

* Je ne dis que l’essentiel

 

« Selon ce principe et si l’on respecte ces trois conditions, le mal nous épargnera. Ce fut également la devise de Gandhi qui avait toujours avec lui une petite sculpture des trois petits singes »

 Petit clin d’œil :

En visitant le blog de Fifi, cette photo ne pouvait que me faire penser  au symbole des trois singes :

http://aufilafil.blogspot.fr/2013/09/en-famille.html

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 Il suffit ensuite de passer le Pont de pierre, d’attendre la nuit,

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pour arriver, rive droite au pied des trois sculptures, figures à la lumière changeante su plus bel effet.

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  Leur position  me fait penser aux Stylites, en haut de leurs perches qui dans la solitude se tenaient loin des turpitudes humaines  du sol et plus près des dieux.

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Ici, point de prière pour se sauver ou sauver l’humanité mais la solitude et le silence. La vision sera toute différente de jour.

*

« La poésie est une solitude,  et nous sommes des moines qui échangeons des silences ».

                       JEAN COCTEAU

*

Mais aussi :

« Il n’est pas de poésie sans silence ni solitude. Mais la poésie est  sans doute aussi la façon la plus pure d’aller au-delà du silence et de la solitude. Elle ressemble en cela à la prière, pour celui qui peut encore prier. Pour le poète, la poésie occupe le lieu de la prière ; elle la remplace et, en même temps, la confirme ».

                         ROBERTO JUARROZ

***

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La présence voulue de ces trois personnages rive droite, faisant face à l’effervescence de la rive gauche, surplombant le Port de la Lune n’est pas innocente non plus.

On aperçoit de loin les trois poètes aux postures figées, y compris depuis la rive gauche,

l’un « se fait » sourd…

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l’autre aveugle…

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et le dernier muet.

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« Le vrai silence est au bout de mots

Mais les mots justes ne naissent

Qu’au sein du silence »

FRANCOIS CHENG

***

On aimerait se hisser sans bruit à leur hauteur pour lire sur leurs yeux, leurs lèvres ou leurs oreilles les messages écrits. Leurs forces s’unissent finalement en un seul personnage dont on suit l’évolution dans la méditation, afin d’arriver à  une maturité de la pensée  ou bien à l’inaccessible étoile.

*

 « L’univers est une catastrophe tranquille, le poète démêle, cherche ce qui respire sous les décombres et le ramène à la surface de la vie ».

                         SAINT-POL  ROUX

 

Plus que jamais vrai dans notre monde actuel, dans les jours sombres que nous vivons ; il est nécessaire de prendre du recul, de fuir l’excitation médiatique, de sentir le poids de la réflexion.

THE POETS, dans » la Llarga Nit », « in the Long Night » ne  sont-ils pas  proches, de  HOUSE OF KNOWLEDGE, Place de la Bourse,  aperçue depuis la rive droite:

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Ce sera notre prochaine étape.

***

« La poésie c’est une sculpture du silence »

GUILLEVIC

Il y a de la musique en toutes choses

♪ ♪ ♪ ♫ ♫

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« Il y a de la musique dans le soupir du roseau ;

Il y a de la musique dans le bouillonnement du ruisseau :

Il y a de la musique en toutes choses, si les hommes pouvaient l’entendre. »

 LORD BYRON

♪ ♫ ♫ ♪

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♪ ♪ ♪

Il y a musique et musique

dans les mots et dans les mains

dans les pas et dans les pieds

dans la bouche et sur les sens

dans le ciel et dans le vent

dans la nuit et dans le noir

dans le temps et dans l’oubli

Tempo, tempo, deux croches noire

suspendue à notre portée

pour chanter siffler et lancer

de la musique à toute volée.

Ecoute mon cœur et ton corps

mon âme et ses je t’aime

sans drame, sans blâme

pour une blanche si blanche

dans la nuit noire

et le silence accroché à ma peau.

Il y a plus de musique dans mes gestes

que dans la houle du printemps.

Il y a plus de mots en maraude

que d’accroches au balcon de l’hiver

et le silence colore les blancs

à la marelle des sentiments.

Maïté L

♫ ♫ ♫ ♪

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♪ ♫ ♪ ♪

Au Jardin public : Invitation à la méditation

 

The Heart of trees, 2007, bronze, 7 figures, 99 x 66 x 99 cm

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Sept personnages assis sur de petits monticules, dans la position qu’adoptent souvent les sculptures de JAUME PLENSA.

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 Sept hommes, un chiffre magique à mes yeux pour une installation entre l’Orangerie et le Museum.

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♪ ♫

 Entre sieste à l’ombre des lettres, pique-nique et lieu de rencontre des passants il a fallu sept jeunes arbres, au milieu des canards.

♪ ♪

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♫ ♫ ♫

Arbres d’avenir, enlacés, embrassés, faisant corps avec les bras et les jambes des personnages tatoués de passions.

♪ ♪ ♪ ♪

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♫ ♫ ♪

Sept humains qui nous offrent leur peau de bronze, le nom des musiciens préférés de JAUME PLENSA dans une communion de l’homme avec la nature et la musique.

♪ ♫ ♪

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« La nature est un temple où de vivants piliers

Laissent parfois sortir de vivantes paroles :

L’homme y passe à travers des forêts de symboles

Qui l’observent avec des regards familiers »

BAUDELAIRE/ CORRESPONDANCES

♪ ♫

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♪ ♪ ♪ ♫

Place Saint-Pierre :Notes, notes de musique

Ainsa I, 2013, acier inoxydable et pierre, 320 x 215 x 380 cm

Collection Mildred Lane Kemper Art Museum, Washington University in St Louis, University purchase, Art on Campus fund, 2013, USA

♪ ♫

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♪ ♪ ♪ ♪ ♫

« De la musique avant toute chose »

écrit VERLAINE dans son « art poétique ».

Même si parfois cette citation a été mal interprétée, elle accompagne ici les notes auxquelles s’accrochent les enfants et que font retentir les musiciens de nuit, sur cette place si animée. Ces derniers voyant le parallèle que j’établissais entre l’œuvre de JAUME PLENSA et mon goût pour leur musique, me donnèrent en partant une généreuse et chaleureuse accolade. La musique est un langage universel.

♫ ♫ ♫ ♫ ♫ ♫ ♫……

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♪ ♪ ♫

Notes de nuit pour Marie-Neige

 

C’est pas Mozart pour un empire
Juste la lune à peine voilée
Simple retenue pour des humains si avides.
Les somnambules dans leur chemise humide
N’ont pas apprivoisé le sablier
Des heures éclatées à la pulpe de la nuit.

C’est pas Mozart, Pachelbel non plus
Juste la tendresse soudain sabordée.
On quitte ses rêves à reculons
à l’heure où le matin vient s’attabler
Dans les vagues des draps réchauffés
Où le réveil prend plaisir à sonner.

C’est pas Mozart, pas même un violon
Ni l’humaine voix de la flûte enchantée
Juste une petite mélodie de nuit;
Nos pensées invitées à valser
Au bras tendu de la moindre lueur
Une étoile pour paupières endolories.

C’est pas Mozart. Mais pourquoi pas?
Quand nos lèvres caressent les volutes bleuies
Des fumerolles de graves marais envahis
Par des iris jaunes grandis dans les reflets
De la lune grise tendrement voilée…
Juste quelques notes à peine envolées.

C’est pas Mozart pour un empire.
Mais pourquoi pas? Imaginez
Si la nuit vous invitait dans ses filets
à résonner vos rêves musique,
Des blanches et puis des noires
Sur l’oreiller, leurs joues à peine rosées…


Maïté  L
le 21/04/07

♪ ♪ ♫

Dans le cadre du soutien à l’organisation de l’exposition, le Casino-Théâtre de Bordeaux présente aussi une œuvre de l’artiste :

Silent Music  II, 2013: Silence et musique intérieure

acier inoxydable et pierre, 310 x 230 x 290 cm

♪ ♫

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♫ ♫

« Enfant, l’artiste(JAUME PLENSA) s’installait à l’intérieur du piano de son père pour sentir les vibrations des sons et de son propre corps. Silent Music II rend compte de cette expérience sensorielle silencieuse, avec cette figure humaine constituée de notes de musiques qui, comme les lettres d’un alphabet, symbolisent l’expression d’un langage universel et permettent à l’artiste d’engager un dialogue avec les peuples ».

♪ ♫

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♫ ♫ ♫

J’aime ce chant que nul n’entendra qui hésite
Entre le vent et la vitre entre le silence et le bruit
Ce chant d’âme à peine
Ou de feuilles qui font là-bas l’automne où personne ne va
J’aime ce chant des pas furtifs toujours comme si
Le moindre mot vers toi qu’on ose était un voleur que le jardin déconcerte
J’aime ce chant qui te cherche et se perd
Et se perd dans la forêt transparente des oreilles
Dans une ville à n’en plus finir de portes pareilles
Errante main mouvante qui n’arrive pas à saisir une chevelure dénouée
Navire avant de vivre évanoui

ARAGON/OFFERTOIRE

♪ ♪ ♪ ♫ ♫

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♪ ♫ ♪ ♫ ♫ ♪

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à suivre…♪ ♫

Marina, Awilda, Paula, Sanna, Nuria, Irma  et les autres :

Des jeunes filles à la mère à l’enfant…

« Seul le visage… »

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«  J’ai rêvé ma vie dans le corps d’une felle. »Femme »est un mot bien assemblé, le nom de tout ce qui s’assemble, fait corps et vient au monde. Le nom de ce qui n’est pas mémoire. Le nom de celle qui d’un rien tombe enceinte. Le nom de ce qui souffre chaque fois qu’il se sépare. Un nom courbe qui arrondit le temps. Le nom de la terre même qui nous porte, de l’eau où nous aimons nager et de l’air que nous respirons. Femme : celle qui de toute chose fait un enfant. »

JEAN-MICHEL MAULPOIX/ L’INSTINCT DE CIEL

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Au fil des lectures, j’ai aimé découvrir que JAUME PLENSA aime la poésie et notamment BAUDELAIRE. Ce fut donc l’occasion de relire  en partie ce poète afin de comprendre quels poèmes auraient pu l’inspirer.

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Mais consciente comme ANDRÉE CHEDID que

« Derrière le visage et le geste

Les êtres taisent leur réponse

Et la parole alourdie

De celles qu’on ignore ou qu’on tait

Devient Trahison

Je n’ose parler des hommes je sais si

Peu de moi… »

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J’ai laissé libre cours à mon imagination qui s’est chargée de faire le vagabondage entre divers poètes qui auraient pu aussi inspirer JAUME PLENSA. Certains poèmes m’ont accompagnée, ont resurgi à maintes occasions de hasard ou de rencontres même éphémères comme celui-ci :

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Mon rêve familier

Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D’une femme inconnue, et que j’aime, et qui m’aime
Et qui n’est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m’aime et me comprend.
VERLAINE

Mais de BAUDELAIRE, j’ai choisi sans hésiter :

À une passante

La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d’une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l’ourlet;

Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son œil, ciel livide où germe l’ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.

Un éclair… puis la nuit! — Fugitive beauté
Dont le regard m’a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l’éternité?

Ailleurs, bien loin d’ici! trop tard! jamais peut-être!
Car j’ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j’eusse aimée, ô toi qui le savais!

CHARLES BAUDELAIRE. LES FLEURS DU MAL

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Il y a toutes ces femmes de la rue, ces inconnues plurielles qui gourmandes, avalent le temps en courant d’air, sans s’arrêter devant les statues de bronze et puis toutes celles qui se souviennent du visage lisse de leurs vingt ans, celles qui aimeraient s’entretenir avec JAUME PLENSA pour croiser les mots en poésie ou qui cherchent dans les prunelles de PAULA ou de SANNA les reflets de passion croqueuses de vie. Il y a toutes celles que ces femmes de bronze, d’encre ou de résine touchent au cœur parce qu’elles sont dans le  sillage de  LA FEMME dont le mouvement est amplement suggéré.

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« Entre l’instant vécu et l’instant à vivre,

S’inscrit notre visage éternel. »

ANDRÉE CHEDID/Tels que nous sommes

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Il y a tous ces dialogues entre hommes et femmes de la rue et les sculptures, ce chant entre la mère et l’enfant dans les estampes.

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…Ecoutons en silence  ANDRÉE CHEDID évoquer ce dernier tableau :

« Ma lande mon enfant ma bruyère

Ma réelle mon flocon mon genêt,

Je te regarde demain t’emporte

Où je ne saurais aller. »

ANDÉE CHEDID/ Brève invitée, à ma fille

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Et puis la nuit enveloppe la ville et les sculptures.

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Elle moule les femmes au visage de flamme

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comme une bougie qui leur dessinerait une aura.

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Dans leur grotte de lumière

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Elles ombrent le ciel

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Des fleuves lisses qu’épargnent les affres du temps.

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« L’homme qui combat avec armes et lanternes,

L’homme qui succombe, plaies et cavernes,

Renaît avril des batailles ,

Bleu des larmes, profonde fleur.

 

Seul le visage est notre royaume,

Son jour traverse nos nuits. »

ANDRÉE CHEDID : Seul, le visage

(à suivre)

 

 

 

« J’ai toujours été passionné non seulement par les mots , mais par la fonction biologique des lettres. Seules, elles ne sont rien, mais ensemble elles forment des mots, qui  ensemble, forment des textes. Une belle métaphore de la vie et de l’humanité ».

JAUME PLENSA

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Dans le salon de l’Hôtel Rohan  (Hôtel de Ville)

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JAUME PLENSA est né à Barcelone et sa ville d’origine reste son point d’ancrage. Là-bas se trouve son atelier où se pressent assistants, fondeurs et ingénieurs.

Jamais aucune ville avant BORDEAUX n’avait accueilli une telle palette de ses œuvres.

 Avant de revenir en détail à ses sculptures prenant leurs quartiers d’été en plein air, nous ferons le détour par le PALAIS ROHAN (Hôtel de Ville) où JAUME PLENSA présente 11 MAQUETTES inédites. Actuellement, le salon où se trouvent les maquettes reçoit 1000 visiteurs par jour.

Petit détour aussi  par la GALERIE ARRÊT SUR L’IMAGE pour une partie de ses ESTAMPES ; ceci afin d’entrevoir le mystère dansant et poétique des phrases et des silhouettes dansant à tour de rôle.

Des estampes de la galerie Arrêt sur L’ image

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Pour en savoir plus :

http://www.galerie-lelong.com/fr/oeuvres-jaume-plensa-110-p1.html

http://fr.wikipedia.org/wiki/Jaume_Plensa

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« Il faut penser de tout son corps écrivait Stéphane Mallarmé à Eugène Lefébure le 27 mai 1867. Tisser avec sa propre vie ces minces rideaux que sont les phrases. Une fine toile de sens et de sons. Solide et musicale autant que précaire. Et devenir alors soi-même, dans l’expectative de la chambre, pareil à cet insecte énigmatique et obstiné.

Ou pareil à la boîte en bois du violon dont les cordes vibrent.

Un poète est un instrument à cordes. Il suspend les accords de sa petite musique dans les angles morts de la vie »…

JEAN-MICHEL MAULPOIX/ L’INSTINCT DE CIEL.

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Les poètes

ne dorment que d’un œil :
La main sur la plume

la main sur le cœur
ils lissent les mots

leur ouvrent la voix

Leur donnent écho.

Les poètes

ne rêvent qu’à l’ombre de la noire
accroche de leur lit.

En marquant le tempo

D’un battement de cil

Ils apprivoisent les veines

Des carrières de sens.

 

Parfois, les poètes pleurent

sur les mots froissés
sur les non-dits, les ratés.
Juste avant de déposer

les mots d’un soir

sur l’oreiller mouillé.

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Les poètes

effeuillent  la lumière

Dans le tissé où perce leur moi.

Sur le fil, dans la danse 

d’un signe de leur main

ils rejettent au loin
l’ombre de la page blanche.

Maïté L

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Souvent l’été, BORDEAUX  au travers de diverses formes d’art offre un jeu de piste inédit qui permet de partir à la découverte des œuvres disséminées dans la ville.

Il y eut notamment OUSMANE SOW, BERNAR VENET et les VACHES.

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Cette année, du 27 juin au 6 octobre, la Ville est devenue la scène privilégiée d’un artiste catalan, mondialement connu : JAUME PLENSA.

Né à Barcelone, JAUME PLENSA est connu  pour ses œuvres monumentales, la  CROWN FOUNTAIN à Chicago, ou L’ÂME DE L’ÈBRE réalisée pour l’Exposition internationale de Saragosse en 2008.

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Après Rio de Janeiro, Salzburg ou le Parc de Yorkshire, les  sculptures monumentales ont pris place sur des places emblématiques de BORDEAUX ainsi qu’au Jardin Public. Parmi elles, quatre sont inédites : deux portraits féminins de 7 m réalisés en fonte de fer : PAULA et SANNA, SELF-PORTRAIT, une silhouette enveloppée dans une mappemonde ainsi que MARIANNE et AWILDA en acier inoxydable, faisant partie  d’une grande collection américaine

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Ajoutez à cela l’exposition remarquable de 11 maquettes dans l’Hôtel de Ville et une série d’estampes inédites présentées à la Galerie ARRÊT SUR L’IMAGE.

http://www.bordeaux.fr/e91819

 

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J’ai parcouru ces divers espaces à pied, et je  continue à les parcourir au gré de mes envies, de jour comme de nuit. Déjà, je ressens en moi la sensation de vide que laissera la fin des installations. Une des raisons de cet engouement vient du fait que JAUME PLENSA a préparé bien en amont cette immersion de ses œuvres à Bordeaux en venant s’imprégner à plusieurs reprises de « l’âme de la ville ».Il est venu « respirer » les lieux, a parcouru la ville à pied, a vécu au rythme de la pluie et du brouillard, a  mûri son projet ,en choisissant des petites places à taille humaine, où se tissent habituellement des liens de convivialité comme cela est parfaitement expliqué sur le site de Bordeaux.

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Il a voulu éclairer le quotidien, donner à voir la contemporanéité du travail de la sculpture au travers de l’évolution de sa démarche.

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Il s’ensuit un dialogue entre la pierre des façades, la minéralité des sols, le regard  du passant qui suit la haute envolée des personnages en bronze, en résine, en fonte, notamment les jumelles PAULA et SANNA, un lien qui perce les dentelles d’acier, d’inox pour suivre le ciel alors que résonnent les accords musicaux, les alphabets du monde ou les pensées profondes liées au langage terre à ciel ou ciel à quais, pierre à ciel ou bien arbres à chœur croque notes, croque mots… menant à la poésie, à la méditation, aux jeux de lumière, à la légèreté, voire à nous-même dans son auto-portrait dont on épouse la coquille en miroir, dont on voudrait épouser la beauté intérieure.

Tous thèmes confondus ne pouvaient que titiller ma sensibilité et mon émotion, l’imaginaire étant au rendez-vous, le souvenir aussi, dans la pierre d’AINSA, village espagnol près de HUESCA que j’ai visité à plusieurs reprises.

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Est-ce le passant qui regarde les sculptures ? Ou ces-mêmes sculptures qui nous renvoient notre image à travers les points de vue de la Ville à redécouvrir.

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Le nombre de visiteurs est tel depuis le dévoilement des œuvres que l’écho en retentit partout en France et dans le monde. Une onde de dialogue, une onde d’espoir, des moments apaisants dont je ne me lasse pas.

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C’est volontairement que certaines photos de mon parcours photographique intégreront les passants. Cela permet de donner une idée des dimensions mais aussi de la vie qui se crée autour de chaque sculpture, notamment avec la présence des enfants : cette vie que JAUME PLENSA appelait de tous ses vœux, malgré les interdictions normales : « prière de ne pas monter… »

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Je vous convie donc à un parcours multiple, parfois silencieux ou amusé, parfois vibrant ou digressant vers des écrits tant les écharpes de mots sont sans fin, éternellement régénérées dans des va-et-vient de l’esprit en marche.

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A suivre…

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