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« Il faudrait réécrire les livres d’histoire, car le seul point de vue de la terre y est exprimé.Or la mer façonne les paysages, les hommes , les sociétés.C’est elle qui apporte prospérité, drames ou  renouveau. Aujourd’hui encore, les hommes de tout bord continuent de l’ignorer, de l’oublier, de n’y voir qu’une manne, une attraction pour touristes.Mais la mer monte, elle gronde de toutes les souillures que nous lui infligeons sans même nous émouvoir. C’est notre amnésie et notre cécité qui la rendent dangereuse. »


Hugo Verlomme
, écrivain de mer.

Préface du livre KOSTA, la côte basque au fil des vagues, ERIC CHAUCHE. Préfaces de Hugo Verlomme et Peyo Lizarazu/ Textes de Guillaume Dufau et Willy Uribe

Editions Surf.2004

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Homme grenouille

disparaît, semblant englouti

virevolte, chevauche la vague;

En équilibre sur les crêtes

crève le mur d’eau

ou glisse quand explose l’écume.

Deux longueurs d’avance

pari presque gagné,

quatre  pas en arrière

et toujours renouvelé

l’impossible défi

face à la marée

l’Indomptée.

Nous, les hommes aux semelles de sable

et de plomb

ne pouvons que rêver

la chevauchée.

Chevaux d’écume

vagues transversales

hennissant de brume

levant l’écume

fièrement.

Et sur le sable

la rumeur va bon train

de lames, de grains

de ciels vagues à la dune.

Les hommes à la double peau noire

transis mais heureux

repoussent la nuit

A l’horizon du toujours.

habillés des dernières lueurs

quand la mer devient de velours

quittent le large

à regret,

les pieds absents.

Ne sont plus qu’os et flammes.

Les flots soumis pour quelques secondes

d’illusions sauvages

et nous pieds de sable

et de plomb

transis sur la dune

l’œil rivé aux flots,

aux planches

aux tourbillons.

Salut l’artiste

le prince

des défis

droit

comme un i

qui glisse vers la nuit

ignorant les profondeurs marines.

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Remerciements à l’Ecole de Surf du Cap Ferret et  à ses hommes « grenouilles »

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photos et texte: Maïté L

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A Vénéneux tirant de lune
Véhémence meurtrière de la nuit.
Conjonction de vent tentaculaire et de sel
Démence frontale à la folie des hommes.
Destruction. Anéantissement.
Inconscience derrière les digues fatiguées
Les digues abandonnées.
Rouleaux à grand train de laboureurs fouisseurs
Murs aveugles incompressibles, au galop lancés
Et des vies, des vies noyées

Tant de vies livrées à la folie humaine

La mer est revenue sous Brouage.
L’île coupée en trois.
Partout, partout, partout,
Seuls les toits émergent à perte d’eau et d’eau
Les sans-toit. Les Sans- travail. Les Sans-Papiers
Les Sans-famille qui ont sombré.
Folie du profit. Folie immobilière.
Est-ce la mer qui a reconquis?
Est-ce la terre qui a sué la misère?
Vénéneuses fleurs de lune et de marée ont frappé.
Douleur. Pleurs. Dignité.
Rêvé.Cauchemardé. j’ai suffoqué.

Tempête de mer

Tourments de terre

tempête de terre

les plaies amères.

Le 2 mars 2010,

coefficient de marée 116.

Souvenons-nous de  la Faute-Sur-Mer.

Maïté L

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Les photos ont été prises ce soir où tout se jouait en noir et eau, en déferlantes et pleurs, en vies arrachées aux bords de mer.

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De temps en temps, il arrive que dans le livre de la mer il y ait des pages moins plaisantes…

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La mer n’est pas une poubelle

Prenons bien soin d’elle. 

 

Sur le sable ébouriffé
Tout griffé

Toutes sortes de déchets
Sont venus s’échouer.

L’océan les a vomis:
Deux troncs  même pas pourris

Cinq doigts seulement d’un faux loup de mer
Un gant de caoutchouc nous laisse amers

Deux briquets privés d’étincelles
Et une multitude de rondelles

Des bouts de filets, c’est logique
Et bien plus grave du plastique

Des bouteilles livrées à la marée
Des bidons et des poches accrochées

Et les 4×4 sans vergogne ont labouré
Le sable et sur la dune, s’en sont allés

Les nouvelles fraîches sur le journal que voici

Il y aurait du saumon : c’est une plaisanterie! 

 

Et puis de temps en temps la moitié  d’un coquillage
Ici il a fini son voyage

Une algue, signe de vie
Comme une respiration, quelle ironie!

La mer n’est pas une poubelle
Prenons grand soin d’elle!

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*******Maïté L

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Sur les plages atlantiques
Traînent les déchets
hétéroclites ou plastiques
perdus ou abandonnés
par l’activité des hommes
Les vagues les ont déposés.
D’autres encore sont ballotés
dans les abîmes des flots,
entrainés par les courants
jusqu’à un dépotoir de plastique
Je veux parler des Sargasses
Cette mer aussi grande
qu’un pays comme la France.
Dans mon enfance
maman disait que les civelles
depuis une mer lointaine
remontaient l’océan
dans une traversée incertaine
Pour peupler nos étangs :
Je ne savais rien d’elles
préférant conserver
le mystère de la vie,
entre mer océans et étangs
signe rassurant des cycles de vies
depuis le commencement.

 

Hélas l’homme dans la course
au progrès parfois pour sa survie
bouscule l’ordre naturel.
Il puise dans les ressources
d’un monde qu’il croit infini.
A son sillage traînent les casseroles
des industries chimiques ou atomiques
aux effets additionnels
Sous une chape de plomb
Continue la société de consommation
qui à coup de lobbying
distille son poison mortel
C’est ce qui me désole !

SERGIO

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UN LIEN POUR LA DÉFENSE DE L’OCÉAN:

 

http://www.dailymotion.com/video/xofbhi_la-mer-n-est-pas-une-poubelle_creation

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Printemps de pépins amers

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La mer du dimanche
a soulevé ses jupons d’écume.
Aux notes lancinantes
du vent suintant colère
Elle a lancé ses virgules
et ses points en suspension.
Elle a accroché le printemps
au porte-manteau de sa dune
ramassé deux ou trois plumes
qui rêvaient sur ses flots
et fait naviguer ses oripeaux;
Bouteilles à la mer
plastique et déchets d’hiver.

Et sur la terre
me direz-vous?
Il pleut du verre et de l’amer

Les bras de la mer

Rejoignent les bras de pleine-nuit

Tordent les mains de ta vie

Quand les yeux dans tous les nids

Cherchent le fil des humaines pensées

Que les mots d’airain résonnent

Et arment les consciences.

Il pleut du sable et des armes

Il pleut des cadavres à bout portant

Il pleut des jeunesses fauchées

Avant le temps des blés,

Il pleut désespoir.

Avant l’espoir de renouveau

Chaque printemps apporte son lot

De fulgurances

De flammes jaillies des yeux

Chaque printemps apporte son lot de rancœurs

Et de larmes qu’on voudrait oublier

Sur terre comme en mer

Les pauvres les oubliés

Epousent l’amertume

Et fièrement dressés

Devant les flots

Montrent leur dignité.

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La mer suintant colère

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Maïté L

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« Les phrases sont de la même étoffe que la mer, tissées par le même mouvement de navette qui trame le proche et le lointain, commençant,finissant toujours, sur la page pareille à la côte où le large reprise ses ourlets. »

Jean-Michel Maulpoix (Une histoire de bleu).

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Plume d’oiseau, plume d’océan
J’ai cueilli ton image au passage.
Veux-tu peigner l’océan qui ondule

ou bien écrire son histoire?
L’entends-tu mugir
et venir lécher le sable

Pour que tu lui rendes hommage?

Il est là; à la barbe de ton dessin souple.
Destin lié au vent,
quand t’es-tu soumise
à la caresse des grains

A la caresse du sable?
Légèrement posée, tu frémis
et tu trembles.
Jamais plus tu ne voleras ?

Tu flotteras peut-être,

Plume légère, plume blanche:
Deux pas en avant, tu hésiteras

Trois pas en arrière, tu ne seras pas fière.


Certains pourraient te croire frêle
mais ce n’est qu’illusion
et dessin  posé délcatement
entre océan et dune


tu es

juste le jeu d’une ombre

Juste le jeu d’une plume.

 

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Maité L


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« Mon plaisir, tu le sais, fut d’aller sur la mer à petits pas.
Je suis resté des heures à discuter seul avec elle, la sourde et la causeuse, la brusque et la très tendre, la bavarde incompréhensible, l’insistante, l’obstinée, la toute-puissante qui se termine en friselis, la marchande d’horizons qui n’a rien à nous vendre et distribue son bleu à qui ouvre les yeux, celle qui ne cesse par vagues de nous rejoindre et nous rejoindre encore, la  bienvenue si séparée qui s’ouvre et se referme. Venue non pas pour se donner mais pour  nous contraindre  à entendre quelle bizarre condition est la nôtre, vouée aux rivages, aux terrasses, lorgnant toujours vers le grand large, y voguant, y nageant parfois, ivres de notre sac de peau, mais seuls avec ce poids de chair, ce coup au coeur de crayon bleu, ces gestes vains d’amant ou de noyé, immergé dans la surdité du dieu venu frotter contre la côte un peu de son immensité »

Jean-Michel Maulpoix  « Une Histoire de bleu suivi de L’instinct de ciel »

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***

Ce jour-là le ciel était à la gribouille. Il faisait orage sur les terres et sur la dune; côté océan le bal des reflets se jouait  sous ciel épais, virevoltant, tonitruant.

Ce jour-là au Grand Crohot, il y avait des bleus de jour, des couleurs coup de poing dans les nuages, des nuances sur le rivage et sur la plage , pas à pas les reflets. Tout est une question de distance , de regard, de chant des éléments. Bien encapuchonnée, le soir pouvait venir. il y aurait du soleil en transe.

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Photos Maïté L pour les deux premières. Photo J L pour la troisième.

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Appel de l’océan…
Lente est l’étale de turquoise et d’émeraude
Contre le vert souple des oyats courbés
Et les zébrures du vent en maraude.
Ecoute le silence du sable qui soupire
Autour d’ un amour de grande marée .
Voiles, silhouettes et planches
Sans arrêt se croisent, se penchent
Dans un envol, survol et corps à corps
Sur la crête des vagues enfiévrées.
Seule leur répond la douce
Blondeur des dunes impassibles.
A l’appel de l’océan,comment résister?

***

Un instant encore, laisse-moi l’humeur au ras de l’eau

L’eau
éclabousse les morsures du soleil

Le sel sur les lèvres

Les lèvres offertes

A peine humides de souvenirs brûlants.

***

Juste un instant

Pétri de sable et d’eau,

d’eau immobile, toutes les mers intérieures du monde,
l’eau des silencieux diamants qui peuplent sa surface,
la nuit des clapotis de pensées habillées des lumières lointaines telles de minuscules phares de vie

des vies prêtes à basculer, tête la première

les yeux habités de milliers de gerbes d’eau

le souffle coupé

coupé du monde

le monde tout autour, absent.

***

Il me faut composer avec
l’eau de tous les transports maritimes et humains
l’eau du corps à corps mer ciel, ligne d’horizon vacillant sous la rondeur du globe.

Sont érodés, brisés,

les rêves d’éternité

Les rêves  éveillés

Les rêves insensés

Voués à
toutes les pensées mouillées d’écume et de brume
toutes les brisures d’eau sous la coque des noix de bois
tous les reflets des si-reines cachées sous leurs voiles de vent

***

Juste un instant : une miette de mouette, au vol lancinant

Décompte le temps

A rebours des embruns du matin naissant,la lumière déjà nacrée

Dispensée en lassos, en lianes, toute rectitude perdue.

***

Juste un dernier instant, le nœud coulant à la croisée de mousse

Si douce qu’elle se perdra, s’évanouira sans autre pouvoir qu’un clapotis

Je t’ai cherché au bord de l’eau

Une mémoire d’eau ;

Je te cherche sur  toutes les grèves,

Les quais silencieux,

Les îles dont j’ai foulé la terre

Le sable où les traces se sont effacées

Chaque bordée d’océan

Chaque  pont

Et dans tous les reflets

Qui se prolongent

S’allongent

Se jouent

De l’instant

Tatoué au creux

De la main

De l’épaule

Dans le sang.

***

Marée

toi qui lances tes flots

Dans tous les courants

Et tous ces ports d’attache

où s’aiguisent les consciences

où gravitent des êtres en partance,

Toujours sur le qui-vive

Tant qu’il y aura d’instants

A ourler au point de croix

Les baisers et l’absence,

La vie et l’eau;

L’eau et la vie

la vie

l’amour de l’eau

l’eau

lave l’amour

l’eau

et la mousse

pour laver l’absence.

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Maïté L

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« L’un d’entre nous parfois se tient debout près de la mer.

Il demeure là longtemps, fixant le bleu, immobile et raide comme une église, ne sachant rien de ce qui pèse sur ses épaules et le retient, si frêle, médusé par le large. il se souvient peut-être de ce qui n’a jamais eu lieu. Il traverse à la nage sa propre vie. Il palpe ses contours. Il explore ses lointains. Il laisse en lui se déplier la mer: elle croît à la mesure de son désir, cogne comme un bâton d’aveugle, et le conduit sans hâte là où le ciel a seul le dernier mot, où personne ne peut plus rien dire, où nulle touffe d’herbe, nulle idée ne pousse, où la tête rend un son creux après avoir craché son âme. »


Un texte de Jean-Michel Maulpoix Une histoire de bleu

***


***

Voici venir la mer


Fidèle si infidèle
Indomptable et rebelle
Me laissera-t-elle coucher sur la page
Les remous de son éternel voyage?
Bohème sertie d’émeraude et de cristal
Grenade aux gerbes d’écume nuptiale
Elle trépigne de vague en ruade
Où les embruns fantômes soulignent sa cavalcade
Ces gardiens aux faux airs de tendre berceuse
Veillent  sans fin sur ses froufrous de laine mousseuse.

 

 

Voici venir la mer

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Voici venir la mer…

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***

 

La Mer…

Maïté L

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Lorsque nous approchons de la dune ,nous sommes toujours saisis par la même émotion. Comme si c’était la première fois. Une sorte de communion auprès de l’autel primitif. Boire à la lumière; boire au vent; boire à la matrice d’océan.

***

Lorsque nous approchons de la dune, il y a tout d’abord l’AVANT. L’approche par le pouls de la forêt où cogne l’écho du cœur de l’océan. Puis  les pieds luttent contre le sable, rencontrent les aides à la montée, lorsqu’elles n’ont pas disparu sous quelque assaut du vent. De chaque côté le blond, le blanc et les ombres des palissades, faibles rempart contre les éléments, les plantes couvre-sol et la chanson du géant qui grandit, grandit avant de nous envelopper dans son fourreau du jour.

***

Puis il y a LE POINT ESSENTIEL, celui où apparaît le bleu, l’émeraude, le calme ou l’agitation et les tourbillons. Le moment le plus attendu pour celui qui revient voir la mer. Le point de rencontre.Le terme d’océan en devient interchangeable. Il se fait sauvage ou lit de douceur de la mer; il oscille au gré des marées.

***

Enfin, il y a LA DESCENTE. Perpendiculaire à l’eau elle est salut, déférence, émotion; Elle est souvent sans mots.

Alors pourra commencer la marche latérale…Viendra la communion et l’avancée solitaire, chacun dans son rapport à l’océan. Vers le nord, bouquet d’émeraude, soleil dans le dos et suivre le déroulé des rouleaux. Vers le sud, marcher à contre-soleil, pour argenter la croupe des vagues et les voir se poursuivre inlassablement.

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***

Parfois, quelques arrêts sur image ponctuent la balade: le regard balaie l’infini et aime  s’arrêter sur le détail insolite, étonnant, sur le bout de sable  où les pas dessinent un halo.

Une vague efface l’autre, un pas efface l’autre. Au soir  sur la plage sera écrit le livre du jour.

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Maïté L

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Avril d’océan, une dune à la peau de pêche,

l’estran entre transparence et silence

Un léger voile au loin.

La dune était blonde, presque blanche, mais

Son teint rosissait

Sous le soleil étonnant.

Tout paraissait paisible ou presque.

Les mamelles de sable
tout en haut de la dune
étaient vierges de pas
et souvent soumises au vent
mais nous dévoileraient peu à peu
L’océan et son répondant.

Au creux de la forêt,

Nous l’entendions battre tambour, lui.

Mais comme nous approchions

A pas claqués sur les montées de bois

Il n’avait déjà plus l’accent tonitruant.

Allait-il livrer son âme

Entre le sable et la peau ?
Allait-il disperser ses bleus
et s’immiscer sous la chemise des passants ?

Allait-il se concerter coquillage

Ou se répandre sur la plage
Jusqu’à percer l’intime de nos pensées?

L’océan était lointain, un tantinet paresseux ;

Il voulait sauvegarder ses creux

Et modeler la ligne d’horizon.

Il nous laissa vagabonder sur l’ocre sentiment

Enserra nos chevilles de fraîcheur et d’eau vive.

L’air avait la douceur d’une trêve

Il nous prit dans ses bras, et nous fit une bulle

Qui d’heure en heure roula entre les passants

***

 

***

D’effleurer ces rondeurs, naquit une clarté  bonheur:

Les pas sur la grève

l’impalpable

aquarelle

au creux

de

la

main.


 

Maïté L

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