Le cloître du Grand-Moûtier

ROBERT D’ARBRISSEL (1045-1116)

 L’abbaye de Fontevraud, et avec elle l’ordre du même nom, ont été fondés par une personnalité à part : ROBERT D’ARBRISSEL, issu d’une famille de prêtres de père en fils.

Il avait une voix tonitruante. Et c’était nécessaire car il s’est fait connaître par une tournée de prédication. Il allait sur les routes, suivi par un grand nombre d’adeptes.

Selon lui chacun pouvait accéder au salut et il pensait que ça valait aussi pour les femmes.

Il prônait la chasteté en couchant à côté des femmes. Cela lui a été reproché et a été assimilé à un péché d’orgueil.

en arrière-plan le clocher de l’église abbatiale

En 1095, il devient ermite dans la forêt de Craon (Mayenne)

En 1101, il fonde une communauté qui s’installe à l’abbaye de Fontevraud (Maine-et-Loire), lieu idéalement situé à l’intersection des régions d’Anjou, de la Touraine, et du Poitou.

Mort en 1116, il est enterré dans le Chœur de Fontevraud. Sa tombe se trouve dans une partie non ouverte au public.

Fontevraud, était un monastère mixte, ouvert à toutes les origines sociales, ce qui était assez extraordinaire pour l’époque.

L’ordre de Fontevraud a perduré jusqu’à la Révolution. La règle  a été édictée par ROBERT D’ARBRISSEL et revisitée notamment par Jeanne-Baptiste Bourbon

du côté de la salle capitulaire

LE POUVOIR AUX FEMMES, LA SALLE CAPITULAIRE EN TÉMOIGNE.

la salle capitulaire

En 1115,ROBERT D’ARBRISSEL nomme Pétronille de Chemillé, première abbesse de Fontevraud. Issue de la noblesse angevine, veuve, elle a rejoint la communauté de ROBERT D’ARBRISSELqui la choisit pour diriger l’abbaye mixte.

Depuis le XIIème siècle jusqu’à la Révolution, 36 abbesses se sont succédé.

D’AUTRES ABBESSES qui ont compté:

Gabrielle de Rochechouart

Au XVIIème siècle, Gabrielle de Rochechouart est nommée abbesse par Louis XV. Elle est la sœur de celle qui deviendra la marquise de Montespan, favorite de Louis XIV. Très cultivée, elle correspond avec des écrivains, traduit « Le Banquet de Platon » et fait jouer « Esther » de Racine.

détails du porche de la salle capitulaire

 Marie de Bretagne, arrive à 33 ans à Fontevraud. Elle redéfinit la règle de l’ordre de Fontevraud dans le sens de l’ascèse.

détails

Julie D’Antin, la 36 ème et dernière abbesse est éduquée à Fontevraud dès l’âge de 3 ans. Elle remet au goût du jour les nombreuses fêtes qu’aimait Gabrielle de Rochechouart. Elle devra quitter Fontevraud en 1792 et l’Abbaye est pillée et vendue comme bien national.12 ans plus tard, l’Abbaye est transformée en prison par un décret napoléonien. Elle l’était encore pendant la deuxième guerre mondiale. La prison, une des plus dures de France sera fermée en 1963.

le carrelage de la salle capitulaire

Louise de Bourbon et Renée de Bourbon

1542, sous l’abbatiat de Louise de Bourbon. eut lieu la reconstruction de la salle capitulaire. Les initiales des Bourbon apparaissent sur le sol, sur le porche…

http://www.cite-ideale.fr/la-salle-capitulaire-ou-la-gestion-collective-de-labbaye-royale/

Détails du porche

A noter que sur les 8 filles du roi Louis XV, 4 furent élevées à Fontevraud. Tout comme deux enfants d’Aliénor et Henri II y furent partiellement élevés : Jeanne(future Jeanne de Sicile) et Jean (Jean Sans Terre).

L’abbaye s’étend actuellement sur une surface de 13 ha et des panneaux explicatifs rendent hommage à l’œuvre de ROBERT D’ARBRISSEL sur les hauteurs du domaine qui offrent un magnifique point de vue.

une vue depuis l’espace Robert D’Arbrissel situé sur les hauteurs

 

 

FONTEVRAUD, 27 juillet 2016

Cela faisait longtemps que J’attendais le moment où j’apercevrais l’ABBAYE DE FONTEVRAUD.

J’avais reçu, dans mes débuts de blogueuse, des photos du gisant d’ALIÉNOR d’AQUITAINE, j’en avais vu la réplique au Musée d’Aquitaine,  Alors, je peaufinais ce rêve : aller à FONTEVRAUD.

Et puis, le 27 juillet 2016, au matin, apparut enfin le panneau du village puis bientôt l’ABBAYE.

Enfin!

Au fond, les gisants

En pénétrant dans la nef, devant le gisant d’ALIÉNOR, j’ai été submergée par l’émotion. Heureusement, il n’y avait pas encore grand monde. J’ai eu le privilège d’avoir ce face-à-face avec l’image d’ALIÉNOR d’AQUITAINE, le souvenir d’ALIÉNOR rien que pour moi pendant un temps très précieux. J’avais tant attendu cet instant. J’étais comblée.

Aliénor d’Aquitaine et Henri II

Bien sûr, je ne suis pas dupe. Il ne reste rien physiquement d’ALIÉNOR mais il reste cependant tant d’elle, l’essentiel, entre les murs où elle a vécu et bien au-delà.

Le souvenir des personnes habite les lieux, malgré tout ce qui a pu éloigner l’ABBAYE de sa vocation première au fil des époques. J’ai vibré devant ces gisants, ne pouvant détacher mon regard de celui d’ALIÉNOR si belle, si digne si élégante et fine, si féminine. Le poids des ans n’a pas de prise sur elle, même s’il en a sur la pierre. Il flotte comme un air de sérénité, une infinie tendresse palpable dans un je ne sais quoi de lumière. Notre petit monde a rendez-vous et aura toujours rendez-vous avec cette grande dame, avec ses failles, ses grandeurs et son destin. Unie, envers et contre tout à son deuxième mari, elle repose aux côtés du roi HENRI II ; Le fils chéri d’ALIÉNOR, RICHARD CŒUR DE LION et ISABELLE d’ANGOULÊME, la femme de JEAN SANS TERRE, leur font face.

Richard Cœur de Lion au 1er plan

Isabelle d’Angoulême et Richard Cœur de Lion

ALIÉNOR les éclipse tous : nous n’avons d’yeux que pour elle : Après des siècles, elle nous fascine toujours.

« Le gisant d’Aliénor semble être une des premières représentations en Occident d’une femme à la lecture ». Xavier Kawa Topor, directeur de L’Abbaye royale de Fontevraud de 2005 à 2014.

Il est à noter que le cœur de JEAN SANS TERRE fut aussi confié à FONTEVRAUD.

La journée se poursuivra ensuite avec la visite guidée, puis nous continuerons seuls la découverte de l’immense domaine… Je rapporterai, comme je le fais souvent, non pas un peu de terre mais un petit caillou du chemin.

Le personnage d’ ALIÉNOR a toujours été une source d’inspiration et le poème qui suit s’inscrit dans cette lignée. Il a été composé par JACQUES ROUBAUD, à la suite de sa visite de l’ABBAYE en août 2013. C’est une méditation face au gisant d’Aliénor, à ses yeux fermés, à son livre ouvert, vide. Il invite le lecteur à inventer un livre possible, à méditer sur le néant. Il suit la forme de la sextine.

Les auteurs de l’Oulipo ont été invités à répondre à la question : que lit Aliénor ?

http://www.fontevraud.fr/lelivredalienor/

 

Le livre d’Aliénor, sextine

 

Morte, allongée, Aliénor

Dans ses mains de gisante tient un livre

Je le regarde ouvert devant mes yeux

Appuyé sur deux doigts de chaque main

Mais si tout semble prêt pour la lecture

Sur les pages du livre il n’y a rien

 

Pas un seul mot n’est là, rien

Sur les pages du livre d’Aliénor

Étrange proposition de lecture

Que celle-là, pages blanches d’un livre

Que morte la lectrice eut dans ses mains

Mais qui n’offrent qu’un néant à ses yeux

 

J’observe de près ses yeux

Il me semble qu’ils ne regardent rien

Sous la violence des siècles la main

A perdu son pouce droit, Aliénor

Perpétuellement soutient son livre

Le regard ailleurs, pour quelle lecture?

 

Décidées pour la lecture

Les pages grises de poussière, aux yeux

Vont-elles se remplir de signes? Livre

Qu’un ange saurait à partir du rien

Emplir de lumière pour Aliénor

Et guider vers l’écriture sa main

 

On imagine sa main

Prête à la ‘tourne’ des pages, lecture

De prières, de psaumes qu’Aliénor

Voulait voir toujours offerts à nos yeux

Où ce serait le poème du ‘rien’

Du ‘pur néant recueilli en ce livre

 

Que chacun invente un livre

Qu’il le confie en pensée à ces mains

Qu’il y médite la leçon du rien,

De la mort terminable, et la lecture

En soit proposée silencieuse aux yeux

De la gisante en attente, Aliénor

 

JACQUES ROUBAUD

la place du village

perspective d’une rue

une très vieille porte.