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PRINTEMPS  DE PEPINS AMERS

2006…2013

 

La mer du dimanche
a soulevé ses jupons d’écume.
Aux notes lancinantes
du vent suintant  colère
Elle a lancé ses virgules
et ses points en suspension.
A-t-elle accroché le printemps
au porte-manteau de sa dune
ramassé deux ou trois plumes
qui rêvaient sur ses flots
et fait naviguer ses oripeaux ?
Bouteilles à la mer
plastique et déchets d’hiver

Notes blanches

Notes grises…

Un homme à la mer?
Perdu dans l’étendue
avec le désir de se laisser couler
dans le ventre de la mer.
Et, comme une proie du temps
il effleure la dune,
il foule le sable
il glisse dans le chaos.
Il rêve

Perdant pied
soudain il fait corps avec la marée.
Il n’est plus qu’un fétu d’univers
balloté par le doux sentiment
d’être fait d’océan.

Printemps de pépins amers

La réalité suinte, s’insinue…

Quand fleurissent les ajoncs
Quand reviennent les genêts
là sur cette route
qui mène à l’océan….
Quand les pins sentent le beau temps
suspendu dans l’air ondulant
Quand la tête bourdonne
quand la chaleur ronronne
Là, sur le haut de la dune
Son regard s’abandonne
aux creux et aux courbes
féminines de la vague.
Il  frôle alors l’indicible
le rêve, la balade sur les crêtes.

Vertige

Des notes blanches

Des notes bleues

Il note l’échappée vers le ciel.

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Et sur la terre
me direz-vous?
Il pleut du verre et de l’amer

Il pleut encore du verre et de l’amer

Il pleut toujours du verre et de l’amer.

Maïté L

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***

Domaine de Certes, au bord du Bassin

***

« Tout ce qui ne peut se dire qu’au moyen du silence, et la musique, cette musique des violons et des voix venues de si haut qu’on oublie qu’elles ne sont pas éternelles »

Louis-René Des Forêts/ OSTINATO

*******

Géo-graphiquement l’absence

Les lignes parallèles infranchissables

Le ciel comme boussole vive

Et ses messagers les nuages

L’imaginaire ombre et soleil

Orfèvre dorant le pourtour

D’un trait fin peut-être,  enfin le sourire

Entre ciel, terre et eau

Le regard aimanté pour

Ne pas perdre le sud et l’ouest

Où se couchent les incertitudes

Parfois plus terre que ciel pluie de fer-blanc.

Mettre les pas dans les dialogues d’ oiseaux

Et l’oubli de la condition de mère

Jetant au vent des lambeaux de roseaux

Un jour sur le plateau de Gergovie

Là-haut le père et l’enfant

Mêmes cirés bleu marine sur les monts

Aux herbes folles, absence de bateaux,

Inaudibles pas, vision fugitive, frêles tentatives de l’être

Toute parole inutile, sifflements vengeurs de l’Histoire.

Mirage aux heures des sentiers tracés

Au bord des pieux iodés ; l’eau, avec la marée

Clapote et emporte au loin les pans immobiles

Du passé retiré dans les limbes de l’enfance.

D’autres Géo-graphies viendront

Sur les pas incertains courant à l’aventure

D’autres destins croisés, des petites mains potelées

Cueillant le sud au détour d’un sentier

Où fleurit la Celtitude

Où les mûres rappellent  l’été

Les senteurs légères d’une vie à inventer.

***

***

Photos Maïté L et les mots jetés au vent aussi.


« Rapproche la marée de mes mains ;

Le sel gris au vert s’électrise,

Les étoiles traîne-sanglot,

Ces glisseuses ont voulu leur chance :

Haute mer déroulant mon linge,

Bas soleil habillant ma mort.

 

 

Dans les airs au rouge abandon,

Le meurtre serait-il à l’aise,

O soleil qui blanchis mon linge !

 

RENÉ CHAR -BELLE ALLIANCE

***

Banalité

Et puis il y eut des éclipses, des regrets
des torrents, par nécessité,
des prairies d’altitude et des lupins

 Des matins à frôler les nuages

Des isards bondissants,

Des cascades edelweiss,

Des marmottes printanières

Et des chardons bleus

Des concerts de clarines

Des fraises sauvages

Et bien des orages.
Mais vers toi je revenais
manquaient quelques touches d’embruns

où déposer  les chagrins importuns.
Oui parfois je te revenais…

En pleine lumière ou dans la grisaille

Sous les tamaris ou dans un hamac

Comme on retrouve de vieux amis.
J’aurais aimé bien davantage…

Tu demeurais bleu-gris ou couleur vertige

Tu t’endormais au creux de mes nuits

Mes mots te palpaient papier mâché

En bouts de phrases inachevées.

Et puis un jour je m’approchais

Clandestine, car le charme se rompait ;

Il fallait recomposer les notes bleues, les notes de feu

Et franchie la dune renvoyer au loin ses brumes.

Au pays de l’absence et des pas syncopés

Faire coton, faire rivière, creuser le lit

De la complicité et de l’intimité recroquevillées ;

A grands coups d’elle faire lumière

Affronter des déserts les écharpes

Apprivoiser le temps qui perdait pied

Et donner à la main le sens de la caresse :

Sans façon. Sans laisser de trace.

Clandestine.

Jusqu’au bout du chant.

***

Clandestine
en jachère l’hiver
et le cœur tout broyé
entre deux pierres
hérissées d’épines.

Clandestine
des mots évanouis
entre deux soupirs
L’humeur chagrine
épelée à l’écho d’hier.

Clandestine
des rives incertaines
des ponts et des sirènes
où les mouettes
balaient l’âme vagabonde

Clandestine
tu te voiles la face
pour éponger l’été
aux diamants de pluie
sillonnant le grain de ta peau.

Clandestine de vies
Entre parenthèses
d’amour marin inassouvi
la terre de bruyère
écope le sang des soucis

Clandestine du sourire
des étoiles plissant les yeux
l’amer n’est pas montagne
lorsque la marée au ras de la coupe
attend l’aube lisse en rubans soyeux.

***

 photos et textes:Maïté L

 » Chaque cri que nous poussons se perd, s’envole dans des espaces sans limites. Mais ce cri, porté jour après jour par les vents, abordera enfin à l’un des bouts aplatis de la terre et retentira longuement contre les parois glacées, jusqu’à ce qu’un homme, quelque part, perdu dans sa coquille de neige, l’entende et, content, veuille sourire. »

Albert Camus

***

BAVARDAGE

Et puis tu sais, jamais je ne t’oubliai, la mer!

Te souviens-tu de ma première voiture?

Une R4 aux sièges en simili cuir et aux pare-chocs chromés.

Elle était chouette même si parfois elle se prenait pour toi,

En faisant des vagues sur le plancher, d’arrière en avant, lorsqu’il pleuvait.

Il me semble bien qu’il fallait freiner à mort

et qu’elle continuait tout droit sans s’émouvoir.

Je ne t’oubliai pas et dès le premier beau jour , je vins te saluer!
Vive la liberté de nos vingt ans!
Mais je m’égare, je m’égare
Car tu te faisais coquine
Cherchant à emmêler ma longue chevelure blonde
A dorer ma peau à la loupe de tes gouttes d’eau!

Il  y avait des matins de nacre et de coquillages

De longues luttes contre le vent entravant la marche

Des sacs de plage rebondis d’où s’échappaient les feuilles noircies

Des bains courageux aux premiers jours de mai trompeurs

Et dans le corps de fine liane toujours la même petite fille

Se multipliant à l’infini dans son attitude humble et souriante

Accueillant les bras ouverts le message tam- tam à cheval sur le présent

Qui lentement s’insinuait dans le creux de sa conscience.

***

La petite fille au bord de la mer

 

De  chaque nuit il faut saisir

Les clés de l’alphabet des lumières

Les consonnes du ciel, les voyelles des vents

Et les lueurs qu’apportent les petites bougies

De la terre.

Au chevet de toutes les lampes

Viennent s’asseoir nos rêves ;

Mangeurs de sombres lames d’ombre,

Ils dansent alors à l’ambre de nos flammes

Car nos ciels ne sont jamais d’éteignoirs ;

Ils se parsèment d’infimes poussières d’étoiles

Allumées en douceur au plafond de nos peurs.

En s’avançant peu à peu vers l’espoir

La petite fille, contre l’arbre posera son livre

De mers, de dunes et de sable

L’échelle de la saison des vents

Qui balaie sans remords les nuages vagabonds

Et leur pesanteur,

Les fonds marins faits de rumeurs incessantes

Et de torpeur ;

Elle gravira quatre à quatre les marches de son alphabet

Dans sa main, chaque jour une allumette.

Pour réchauffer  son cœur.

Dans son cœur, quelques rayons de soleil

Une poignée de mer, une poignée de monde

Et des reflets :

Tant de lueurs à imaginer

Pour peu qu’elle ferme les yeux.

En elle, trouvera-t-elle les chemins du  bonheur ?

 photos Le Grand Crohot et textes:Maïté  L

***

***

Au terme de cette conversation murmurée, mes remerciements à Frantz pour sa suggestion de lecture d’Albert Camus :La mer au plus près

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« Je serais bien l’enfant abandonné sur la jetée partie à la haute mer, le petit valet, suivant l’allée dont le front touche le ciel. »

Arthur RIMBAUD / Illuminations

BALBUTIEMENTS

 

Te souviens-tu? Il y a si longtemps …
C’était au temps où je ne te voyais , toi la mer, qu’une à deux fois par an. La première fois peut-être.
Une partie de mer gâchée.
Un petit garçon de mon âge avait eu si peur de toi qu’il s’était enfui à toutes jambes, loin, loin dans les dunes. Il avait fallu courir en tous sens pour le retrouver.
Et c’était déjà l’heure de s’en aller.

L’autobus n’attendait pas les retardataires.

Le Grand Crohot/ Maïté L

et toi l’enfant qui découvris l’océan à travers les châteaux de sable: je me souviens de ton bob rouge. Tu as bien grandi et tu n’aimes plus la sensation des grains de sable entre les orteils.Te souviens-tu du jour où attiré par la forte marée, tu voulus dès l’arrivée voir cette muraille d’eau qui t’aurais roulé comme un fétu de paille.

Il fallait bien protéger ta peau blanche et tes cheveux blonds des assauts du soleil. D’ailleurs le soleil couchant te convenait mieux, lui qui dorait doucement ta tendre peau.Papa, maman , le seau et la pelle et le goûter à l’ombre du parasol qui parfois s’échappait pic sur la pointe et pac sur la tête, volé par le vent de mer.

sur la plage , au crépuscule,
Les ombres des châteaux
étendent leurs tentacules,
Et gourmandent les vagues
qui , à coups de langues;
lèchent ,un à un, les grains de sable.
Châteaux abandonnés,
Ruines sans armes ni ronces,
sans amour ni pervenches,
Forteresses et petits goûters
Des jours d’enfance ensoleillée.
Entre les vols furtifs de mouettes,
et les noires silhouettes,
Main dans la main,
La caresse des algues
et l’ivresse du vent
les couchent inexorablement
Au fond des océans. 

 

Andernos/Maïté L

Laurent Demany:l’homme qui, patiemment  tisse des fils de poésie vague après vague


Il y a quelques jours déjà, j’ai eu l’occasion de faire la connaissance de  Laurent Demany: il est  l’auteur du livre

«  GRAND CROHOT

Images pour Génie d’Arthur Rimbaud ».

 

Scientifique,passionné de photo, d’océan et de RIMBAUD, celui qui se dit photographe amateur parcourt en solitaire les plages  à des moments où il peut plus facilement entrer en communion avec l’océan. Durant  les mois de la saison froide, quelques heures après le lever ou bien avant le coucher du soleil, LAURENT DEMANY va à la rencontre des instants changeants où la lumière se révèle si particulière, entre la douceur des paysages marins et leur fougue, la véhémence des éléments parfois déchaînés et  leur apaisement.

A force de traquer la vague et le ciel, les lignes et les couleurs, les formes et les matières, entre musique d’un rideau d’écume et grains de sable, entre transparence et intenses coloris des tourbillonnantes profondeurs, au cœur et au rythme des pulsations de la vague, les images sont nées, ont grandi, ont pris l’ardeur d’un rêve d’océan qui consume le photographe. Sept ans d’embruns, de traces sur le sable aussi vite laissées qu’effacées, sept ans d’un regard qui devient percutant, et va à » l’essenciel et mer », le puriste sculpte la mémoire de l’océan comme d’autres sculptent la glaise ; 91 photos font écho au poème GENIE de RIMBAUD.

En outre, l’auteur a publié dans son ouvrage une reproduction du manuscrit écrit de la main de RIMBAUD que ce dernier avait confié à son ami PAUL VERLAINE en 1875 ; pouvoir détailler le texte original, placé à la fin des Illuminations dans les éditions du livre de poche (à tort ?) est un moment de pure émotion.

Dans l’ouvrage GRAND CROHOT, autour de ces deux mots magiques s’écrivent des lignes et des images, des liens qui vont des mots de RIMBAUD aux photos grandioses, à moins que ce ne soit l’inverse ; les mots calligraphiés semblent parfois prendre leur temps et leur part de mystère, semblent s’effacer sur la grève ou au contraire s’incruster et souligner le lyrisme, l’invocation à l’océan au travers des clichés choisis. Génie… Génie et sa part de mystère résonne en nous et résonnera longtemps encore lorsque nous irons cueillir des pages d’écume.

« Il est l’amour…et l’éternité. » écrivait Rimbaud.

JEAN-MICHEL MAULPOIX  quant à lui écrit dans  « UNE HISTOIRE DE BLEU » :

« Les phrases sont de la même étoffe que la mer, tissées par le même mouvement de navette qui trame le proche et le lointain, commençant, finissant toujours, sur la page pareille à la côte où le large reprise ses ourlets. »

Ce passage déjà cité en exergue de mon site   correspond bien au langage photographique et poétique de Laurent Demany.

Plonger dans son ouvrage , parcourir l’exposition de ses photographies, échanger sur des sujets que nous avons tous deux chevillés au corps, fut un régal.

 

Un jour, qui sait, le hasard nous fera nous rencontrer , appareil photo en main, devant les splendeurs océanes du Grand Crohot ou d’ailleurs.

 

Photos et billet: Maïté L

élan

arrêt sur image

et

Au sel de l’eau battre tambour

Japper tout contre flanc pantelant de la marée

Courir  entre les boucles et les fleurs d’écume

Et donner le sourire aux passants.

s’unir avec son ombre pour venir à bout de la marée.

Maïté L

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Printemps de pépins amers

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La mer du dimanche
a soulevé ses jupons d’écume.
Aux notes lancinantes
du vent suintant colère
Elle a lancé ses virgules
et ses points en suspension.
Elle a accroché le printemps
au porte-manteau de sa dune
ramassé deux ou trois plumes
qui rêvaient sur ses flots
et fait naviguer ses oripeaux;
Bouteilles à la mer
plastique et déchets d’hiver.

Et sur la terre
me direz-vous?
Il pleut du verre et de l’amer

Les bras de la mer

Rejoignent les bras de pleine-nuit

Tordent les mains de ta vie

Quand les yeux dans tous les nids

Cherchent le fil des humaines pensées

Que les mots d’airain résonnent

Et arment les consciences.

Il pleut du sable et des armes

Il pleut des cadavres à bout portant

Il pleut des jeunesses fauchées

Avant le temps des blés,

Il pleut désespoir.

Avant l’espoir de renouveau

Chaque printemps apporte son lot

De fulgurances

De flammes jaillies des yeux

Chaque printemps apporte son lot de rancœurs

Et de larmes qu’on voudrait oublier

Sur terre comme en mer

Les pauvres les oubliés

Epousent l’amertume

Et fièrement dressés

Devant les flots

Montrent leur dignité.

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La mer suintant colère

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Maïté L

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« Les phrases sont de la même étoffe que la mer, tissées par le même mouvement de navette qui trame le proche et le lointain, commençant,finissant toujours, sur la page pareille à la côte où le large reprise ses ourlets. »

Jean-Michel Maulpoix (Une histoire de bleu).

***


Plume d’oiseau, plume d’océan
J’ai cueilli ton image au passage.
Veux-tu peigner l’océan qui ondule

ou bien écrire son histoire?
L’entends-tu mugir
et venir lécher le sable

Pour que tu lui rendes hommage?

Il est là; à la barbe de ton dessin souple.
Destin lié au vent,
quand t’es-tu soumise
à la caresse des grains

A la caresse du sable?
Légèrement posée, tu frémis
et tu trembles.
Jamais plus tu ne voleras ?

Tu flotteras peut-être,

Plume légère, plume blanche:
Deux pas en avant, tu hésiteras

Trois pas en arrière, tu ne seras pas fière.


Certains pourraient te croire frêle
mais ce n’est qu’illusion
et dessin  posé délcatement
entre océan et dune


tu es

juste le jeu d’une ombre

Juste le jeu d’une plume.

 

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Maité L


Châteaux de Sable


Sur la plage, au crépuscule,

Les ombres des châteaux

étendent leurs tentacules,

Et gourmandent les vagues

qui, à coups de langues,

lèchent,un à un, les grains de sable.

Châteaux abandonnés,

Ruines sans armes ni ronces,

sans amour ni pervenches,

Forteresses et petits goûters

Des jours d’enfance ensoleillée.

Entre les vols furtifs de mouettes,

et les noires silhouettes,

Main dans la main,

La caresse des algues

et l’ivresse du vent

les couchent inexorablement

Au fond des océans.

Maïté L