10 ans après l’ouragan Klauss dans les Landes-1-

De l’abattement à l’espoir

Il me faut planter le décor de la série de billets qui vont suivre:

Dans la nuit du 23 au 24 janvier 2009, la tempête Klauss a tué 12 personnes en France et mis à terre 230 000 ha de forêt, soit 60% du massif landais.

Depuis cette nuit-là, après le passage du vent à 130, 140 km/h, les Landes ne sont plus comme avant et j’ai eu, au fil des ans, l’impression de traverser un champ de désespoir, d’où s’était enfuie toute vie, puis un désert, avant de reprendre espoir, afin d’effacer peu à peu le traumatisme.

Mon père, sylviculteur, ancien résinier, était mort 4 ans auparavant. Ma mère était octogénaire. Une montagne de problèmes s’est élevée devant nous. » Nous », c’est avant tout mon mari, sans qui rien n’aurait été possible.

A 84 ans, ma mère a parcouru la forêt avec moi pour évaluer les pertes de plusieurs générations: elle avait, dans son enfance, planté certains des pins à terre.

Nous sommes de petits acteurs de la forêt et notre chance a été de nous regrouper en association, de trouver sur notre chemin des bénévoles qui n’ont compté ni leur temps ni leurs efforts. Sans eux, nous n’aurions pu reboiser.

Nous avons dû apprendre en urgence; nous ne sommes pas toujours tombés sur des gens honnêtes. Cependant, c’était une évidence qu’il fallait reconstituer la forêt pour les générations futures: nous ne sommes que les maillons d’une chaîne.

Notre travail n’est pas terminé mais je tiens à présenter les étapes qui le jalonnent.

Il s’agit aussi d’un attachement à mes racines.

AVANT, c’était comme ça:

la forêt majestueuse

Entre ombre et lumière
un pare-feu

LE VIEUX PAYSAN LANDAIS

Quand le vieux paysan sentait la mort le frôler

Et que la vieillesse, au soir d’une journée

De travail bien remplie, sans aucune force le laissait,

Lorsque la terre nourricière désormais il ne pouvait

Plus venir la labourer… Dans ses champs abandonnés,

Il donnait, une dernière fois, contraint et forcé

La vie dans des sillons de sa main tremblante tracés

A de jeunes plants de pins maritimes destinés

A croître cinquante ou soixante-dix ans bien comptés.

Alors on voyait à ses côtés, dans un élan de solidarité,

Frère, cousin, femme, enfants et voisin affairés,

Ne pas ménager leur peine et contribuer

A passer le flambeau aux descendants à peine nés.

ET juste avant de mourir, le cœur plein de sagesse, apaisé,

Il parcourait une dernière fois ses petites parcelles boisées

Avec dans le cœur, le sens du devoir accompli et la fierté

D’embrasser d’un regard rassuré

Ces terres de sueur qu’il avait tant aimées.

Mais déjà la Terre s’était mise à protester

Et tempêtes après tempêtes déclenchées

Les éléments inlassablement se déchaînaient.

Les mauvaises années se succédaient

Laissant craindre le feu qui tout ravageait

Ou les nuits interminables où les pins s’écrasaient

Dans un fracas d’enfer contre sa porte sans s’arrêter.

Puis vint Klauss et l’horreur jamais égalée.

Aujourd’hui, en passant devant la porte du cimetière déglinguée

J’ai simplement dit, moi aussi résignée,

« Pépé, mémé et papa si vous saviez

Comme d’autres vous perdriez la mémoire des faits

… Ou vous en mourriez »!

Maïté Ladrat/ Landes le 29/01/2009

APRÈS

Volis et chablis
au loin des pins ont résisté

à suivre

2 commentaires

  1. Terrible spectacle de désolation pure…
    Et très beau ton poème, plein d’amour pour la terre et tes ancêtres.
    Je ne savais pas que c’était 60%. Quel chiffre effrayant.

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