Auteur/autrice : Alienor
Perdre
Perdre
Perdre ouvre-t-il la porte au royaume des ombres
Ce verbe du présent conjugué au passé est-il
Signe d’errance. Reflux du néant.
Sable à sable, des grains d’incohérence
Nous laissent nus et démunis. Perdre finit-il par occuper les jours
Et les nuits d’oubli ?
Te perdre. Me perdre
Une blessure de l’inconscient et un goût d’amertume
Dans la bouche, l’absence
Chevillée à la langue, au double sens et sens interdits.
Perdre sa jeunesse au cumul des années
Par feuilleté impalpable d’un pyramidal incertain.
Les poches alourdies de désert aride, de murs
Et cailloux cliquetants en lieu et place des yeux fermés.
Tant d’êtres à chair fanée
Tant de gouttes de temps taries.
Perdre devient-il le royaume des ombres
Dédicace du passé, inexorable fenaison de l’encre
Terre à terre, sac et ressac des herbes inexorables.
Perdre finit-il par occuper les pensées parties à la recherche du jour
Et de l’éclair salvateur des nuits ?
Perdre , verbe synonyme du verbe fouiller, retourner non le ciel
Mais le quotidien à la loupe de l’incompréhension.
Dites-moi comment vous perdez : les êtres, les objets précieux, les chemins
Le temps, les papiers… comment vous aimez à perdre la raison
Et peut-être trouverons-nous la clef, la porte d’entrée,
Peut-être mettrons-nous à distance les ombres de notre mémoire.
Maïté L
Et ma dédicace ira à tous ceux qui cherchent…
Vertes prairies
Vertes,
Les prairies sous le vent
Font le gros dos, en écoutant
Les grillons, fredonner note à note,
Leur unique chant.
Dans les hautes graminées,
Les chiens glissent et dansent,
Happés par l’ardeur du printemps.
Ils reviennent frétillants,
Poussés par l’envie des oiseaux
Et parfois voyage, grâce à eux, la fleur à leur museau.
Soudain,
Un sentier gris, sous les chênes séculaires,
Qui de leurs branches recourbées
Rendent grâce à la terre.
Pour nous du ciel ne reste
Que le toit de verdure perdu dans le temps.
Un arbre mort, géant à terre, fait des vagues et
S’arc-boute dans un soubresaut de reptile figé :
Reste pathétique la dépouille d’une amère tempête.
Le temps est vert comme l’envers du temps.
Mais,
Quelques fleurs ça et là murmurent leurs touches de couleurs :
Elles sont rubans ; elles sont mélodies
Elles sont vagues au refrain de bourdons et de routes abandonnées
Elles sont charme et apesanteur
Crayons de couleurs et peintres impressionnistes gardés dans nos pensées
Elles sont tous nos bouquets d’enfants qui savaient à qui les offrir
Pour un sourire, un mot d’amour de pétales froissés.
Bientôt,
Les prairies deviendront nocturnes.
Elles imprimeront leurs humeurs de marais
Et s’enrouleront autour des creux de vie assoupis.
La nuit descendra jusqu’à l’absence d’horizon,
C’est tout ; c’est tout.
Le jour s’effacera peu à peu, ne laissant que la ronde
Des grillons à cheval sur le dos de l’oubli,
Et les âmes de terre des vers luisants,
Accrochés aux brins d’herbe et aux feuilles accueillantes.
Nature et harmonie :
Ici,
Humblement
la nuit papote ou clapote à vagues de prairies.
Maïté L
Fleurs de mots
Les semis de fleurs
ont atteint la toile
et j’ai mis la voile
là où le vent emporte
les rimes , les coeurs
et les poésies
les chants, les cris et les mélodies.
j’ai regardé pousser les fleurs
d’éternité
qui surgissent d’un passé
où le temps les a jetées
à la volée.
Les semeurs de graines
de futur et d’inconnu
ont dépassé nos espérances
ils ont allumé des couleurs pures.
Donnez-nous des fleurs bleues
donnez-nous des fleurs rouges
des belles difficiles
des belles ingrates
des amours de lune rousse
pour poètes retrouvés.
Des fleurs de mots allumées
aux lampes de la fraternité.
Maïté L
Une prairie au vent et des coquelicots malmenés, balancés, penchés, privés de leurs pétales retournés. Les marguerites plus à l’ombre vivaient leur vie de blanches fleurs en lisière de l’été.A deux pas de la route, une traînée de couleurs.
Et un poème écrit un jour pour accompagner les semis du bonheur des yeux.
le parti-pris des choses
Le parti-pris des choses
Le parti-pris des fleurs
Dans un jardin ordinaire.
Et voici comment dans une prison dorée
Se faire happer par le bout du cœur
Ou par la danse des pétales
L’axe tige autour duquel
S’apaisent les pensées,
A ce que l’on croit.
Dans le harem des cœurs
Les belles rivalisent d’ardeur
Pour séduire l’indécis
Et le prendre dans leur lacis,
Dans l’étrange citadelle
Où se jouent en sourdine
Les drames de l’ombre
Les drames de la terre partagée.
Attendre son heure
Ou bien imposer ses atours
Empoisonner l’existence
Feuille à feuille, racines contre racines,
S’écarter et végéter
Ou filer son chemin
Dans un petit coin,
Apprendre à modestement chuchoter
Ou à jubiler aux heures beauté :
Tout cela se trame dans un jardin.
L’homme qui, sur la sagesse croit se pencher
N’aperçoit aussi parmi les fleurs
Que son humble reflet
D’être imparfait.
Maïté L
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Tout avait commencé avec ce coup de coeur: la fleur très éphémère de cette plante surnommée les oreilles de quelque chose, cerf ou de lapin, qu’importe! aperçue dans le jardin de ma mère. Après un bouturage facile, la belle passa l’hiver, à l’abri puis sortit profiter de l’été.Mais toujours pas de fleur.
Et puis un jour, grâce à une internaute avec qui nous passâmes de belles heures à Saint Guilhem Le Désert puis à Brissac-Le-Haut, nous rencontrâmes dans une ruelle de ce dernier village, la fameuse plante grasse de taille respectable couverte de fleurs rouges. Son propriétaire avec qui nous taillâmes une bonne bavette nous fit cadeau d’une « oreille ».Elle rejoignit les autres.
Et cette année, surprise: trois boutons d’epiphyllum, cactus orchidée, apparurent.Tout l’intérêt de cette plante qui part dans tous les sens est dans sa floraison spectaculaire.Les bourgeons apparaissent et se transforment en boutons floraux de 15 cm environ jusqu’à l’apparition de la fleur magique.
********************************************************************** Encore un sujet sur les fleurs me direz-vous! Eh oui c’est un peu la gazette et les gazouillis du printemps. Ce n’est pas le merle habitué des lieux où il y chante des après-midi entiers qui me démentira.
Mignonne allons voir si la rose
Mignonne, allons voir si la rose
A Cassandre
Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avoit desclose
Sa robe de pourpre au Soleil,
A point perdu ceste vesprée
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vostre pareil.
Las ! voyez comme en peu d’espace,
Mignonne, elle a dessus la place
Las ! las ses beautez laissé cheoir !
Ô vrayment marastre Nature,
Puis qu’une telle fleur ne dure
Que du matin jusques au soir !
Donc, si vous me croyez, mignonne,
Tandis que vostre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez, cueillez vostre jeunesse :
Comme à ceste fleur la vieillesse
Fera ternir vostre beauté.
Pierre de Ronsard
…Et merci à Guy de m’avoir remis en mémoire ce poème et de l’avoir envoyé vers » Aliénor »…
J’en suis très touchée.En retour, voici de véritables roses Ronsard, prises la nuit, dans mon jardin.
En avril 1545, Ronsard rencontre Cassandre dans une cour de Blois. Cassandre Salviati , fille d’un banquier italien a treize ans. il en a vingt.
Le surlendemain, la cour quittait Blois et « il n’eut que le moyen de la voir, de l’aimer et de la laisser à même instant ». L’année suivante elle épousera le seigneur de Pré.
Ronsard la reverra et chantera la belle en sonnets dont certains sont des merveilles d’harmonie. Ronsard ne concevait pas la poésie sans la musique.
Ronsard destinait ses poèmes à être chantés.
Laissons-nous donc porter par la musicalité; le poème empreint de beauté, nostalgie, d’épicurisme discret est universellement connu.
Noctambule
« Mon cirque se joue dans le ciel, il se joue dans les nuages parmi les chaises, il se joue dans la fenêtre où se reflète la lumière » (Marc Chagall).
Une étrange nuit se presse contre le flanc de la terre.
Mille chuchotis. Mille soupirs. Mille froissés
Dans le secret des lucioles.
Orange lueur en accordéon. Pensées souterraines
Les yeux cherchent les étoiles de terre, de ciel partagé
Au rythme du front plissé.
Ombres Matisse Chagall oniriques silhouettes au geste
D’harmonie. Il existe un monde sous le monde.
Dans une île. Dans les replis nuit et bulle.
Maïté L
Voie d’arbres
Tu trembles, tu murmures tes certitudes
En éclats rouge sang dessus, dessous vermillon cru
Et puis tu sombres dans la brunitude et le silence noir.
Au matin rassuré sur la présente métamorphose
A l’abri de la ville, juste un point,
Une miette
Enchâssée dans les divagations du moment.
Virgule tu seras et rameaux japonisants,
A la cadence des mots images et turbulences.
Les trilles s’envolent en plumes ébouriffées :
Becs arrondis,
Becs affamés,
Dans le nid apprêté.
Rontitudes juteuses, racines , fleurs et jusqu’au bout des feuilles
Tes fruits criblent l’espace ciel dans un souffle.
Ombre tu seras
Tissée de nos jours, tissée de nos peurs.
Tu fais sens, tu fais signe à la parole
A faucher le temps.
Maïté L
le monde blanc en haïku
Les déserts profonds
dans le noir si étoilé
seul un chien aboie.
.
*
Caresse du jour
son dos comme une colline
museau frais du chat[
*
l’été s’est posé
sur tes rêves voyageurs
un frémissement
*
Un oiseau statue
Foule des passants pressés
trois chaises vides
*
souffrance blanche
Le couloir des pas perdus
Le fil de la vie
*
Amandiers en fleurs
sur la colline des vents
Rimbaud sulfureux
*
Une libellule
rivière des demoiselles
le pont ensoleillé
*
Abricot juteux
Champagne! les yeux pétillent!
le soleil en rit encore
*
L’arbre à poésies
ce soir a beaucoup fleuri
de mots pétales
*
Ombre alanguie
Une épaule dénudée
Baiser papillon
*
Soleil au zénith
Les pieds dans le frais ruisseau
Une ombre passe.
*
Une voix s’est tue
chantre de la misère
pour les sans-abri
*
Reine d’un seul jour
glamour et peau de pêche
blanche pluie de riz
*
Pendants et cristaux
Blanches branches étoilées
heures diamantées.
*
Le ciel tourmenté
pour se faire pardonner
a viré au bleu
*
Maïté L